Val-et-Châtillon

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Il y a 70 ans, le Val était libéré !

Publié le mercredi 19 novembre 2014

Auteur : Olivier BENA

La guerre éclate le 3 septembre 1939 au lendemain de l’invasion de la Pologne par l’armée nazie. Notre village qui avait déjà beaucoup souffert lors du premier conflit mondial, s’apprête à vivre des jours tout aussi difficiles. Pendant les quelques mois de ce que l’on a ensuite appelé la « Drôle de guerre », rien ou presque ne se passe. Les forces vives du village sont mobilisées dans l’attente d’un départ imminent à la guerre.

La guerre commence réellement le 10 mai 1940 lors de l’agression allemande contre les Pays-Bas, la Belgique et le Luxembourg. Franchissant et laminant ces pays, c’est ainsi que débute la Campagne de France qui voit la capitulation de la France. Les Nazis sont à Paris le 14 juin. C’est ainsi que tous les hommes valides âgés de 18 à 60 ans sont mobilisés pour se rendre à Dijon. Beaucoup partent par leur propre moyen.

Le village ne reste pas bien longtemps libre puisque les Allemands l’envahissent comme de nombreuses communes le 20 juin 1940. Ils n’y restent que peu de temps avant de rejoindre Cirey. Déjà cinq civils sont faits prisonniers et envoyés en Allemagne.

La fin 1940 voit l’arrivée des premières cartes d’alimentation pour le pain. Dès l’été 1941, la fumée des cheminées et le crépitement des machines des usines reprennent. N’étant pas épargné non plus, le château de Châtillon est occupé par l’unité S.S. 20 275 H de la Gestapo. En février 1943, des prisonniers de guerre reviennent au village. Leur captivité les a diminués physiquement.

Les Allemands n’ont pas trop stationné dans la commune même si certains foyers ont dû accepter la présence de soldats dans leur maison. Sur le mur des façades, se trouvait un écriteau où était inscrit un nombre signifiant la quantité d’Allemands présents dans ladite maison.

En juin 1944, les alliés américains débarquent en Normandie. On espère une possible libération de la France. Dès septembre, sentant les positions américaines se rapprocher de notre secteur, les Allemands quittent Cirey. Les alliés vont stationner plusieurs semaines près de Lunéville. Ceci entraîne le retour des Allemands au village qui y installent un état-major dont la tâche principale est la traque des résistants.

Début septembre 1944, une rafle de civils a lieu à Pexonne et à Neufmaisons. Entourés des troupes allemandes, cette vingtaine de prisonniers de guerre ont traversé le Val et sont passés notamment dans la Grande Rue. Ils ont été envoyés ensuite dans des camps de concentration. Certains ont survécu mais d’autres n’en sont jamais revenus.

Afin de réduire à néant les positions stratégiques allemandes, l’aviation alliée survole les environs et effectue des bombardements. Le 22 septembre 1944, le carrefour de la rue Rayeterre et celle de Cirey est visé. L’immeuble de M. Camille Romary est détruit, entraînant la mort du jeune Roger Lauber. Une autre bombe tombée derrière l’église tue Mme Parmentier.

Début octobre 1944, la libération est imminente. L’espoir est ressenti et porté par les résistants et le maquis. Sentant la guerre leur échapper, les Allemands deviennent de plus en plus cruels. M. Joseph Cayet est fait prisonnier et conduit à Dachau pour avoir ravitaillé en denrées le maquis. Il n’en reviendra pas. A son tour, M. Charles Thomas sera arrêté et fusillé avec trois compagnons de Résistance dans le bois de Cirey le 14 octobre 1944 (voir lien).

Les Alliées progressent rapidement en novembre 1944 sous l’impulsion du Général Leclerc et de la 2ème D.B. Notre Val est libéré le 19 novembre 1944 après plus de cinq ans de guerre. Il n’existe aucune source écrite évoquant cette journée. Heureusement, il demeure des souvenirs et des témoignages locaux.

Quelques souvenirs de la Libération du Val :

Roland Dardaine qui avait 15 ans en 1944 raconte :

« Le 19 novembre 1944, le Val était libéré de l’occupant nazi. Les témoins de cette époque se souviennent parfaitement de cette radieuse journée qui marquait la fin de plus de quatre ans d’asservissement. Deux mois auparavant, le front s’était stabilisé à une trentaine de kilomètres de chez nous. C’est à partir de ce moment là seulement que les troupes allemandes se sont manifestées. Leur présence massive nous valut d’ailleurs, le 22 septembre 1944, une attaque aérienne avec un lâcher de 6 bombes, dont deux visaient et rataient le pont de Charampont au Bajeu : pas de victimes mais un impressionnant cratère de 8 mètre de diamètre dans le jardin de la famille Vouaux et pour moi la peur de ma vie !.
Je me trouvais en effet sur la route à 50 mètres de là, courant gagner la cave de la maison Wentzel (ancienne maison de l’ONF) lorsque le soufle de l’explosion me projeta à plusieurs mètres sous une pluie de décombres. Si je m’en suis tiré sans la moindre égratignure, ce fut par miracle. Deux autres bombes destinées au carrefour de la place de l’église manquaient également leur cible mais, en explosant sur le rocher au-dessus de l’entrée de la rue de Châtillon tuaient Madame Camille Parmentier. Les deux dernières bombes lâchées touchaient de plein fouet et détruisaient totalement les maisons Blaise et Romary au carrefour des rues de Cirey, Rayeterre et de Morval, tuant le jeune Roger Lauber. Au total, une chance incroyable qu’il n’y ai pas eu plus de victimes si l’on exclut quelques blessés légers. L’Etat Major allemand qui occupait le village déménageait aussitôt au grand soulagement de tous.

Pendant ces deux mois d’attente, durant lesquels les alliées regroupaient leurs forces, les gens du Val – et d’ailleurs – ont beaucoup souffert : restrictions alimentaires, réquisition (TSF, vélos, …), exaction de la milice française abjecte et très active. Aussi, est-ce avec joie que fu accueillie la nouvelle de la reprise de l’offensive de nos troupes.

Le 18 novembre, celles-ci étaient à Badonviller et, en soirée, arrivaient à Petitmont où un engin antichar allemand embusqué à l’entrée du village causait de sérieuses pertes à la colonne de blindés de la Division Leclerc qui descendait du « Bon Père ». Dans un des chars touchés, deux frères jumeaux trouvèrent malheureusement la mort.

Pendant cette journée, le Val subissait un violent bombardement d’artillerie qui, par chance encore et en raison de la dispersion de l’habitat, ne touchait que peu de maisons et ne fit qu’une victime, Madame Marguerite Lorrain dans la rue du Beau Soleil, tuée par un des éclats d’obus qui traversèrent sa porte.

Les derniers allemands, pour la plupart des troupes de réserve comprenant de très jeunes gens (des gamins de 16 ans à peine) et des vétérans quittaient définitivement le pays pour ne plus y revenir.

La nuit fut calme pour les habitants terrés dans les caves et les abris en s’attendant au pire pour la journée du lendemain. Or, ce dimanche 19 novembre, à l’aube d’un jour qui s’annonçait plein de soleil, les premiers éclaireurs de la 2ème D.B. venant de Petitmont à travers le Bornabois, arrivaient simultanément aux cités du Moulin et de Nitra où ils étaient accueillis avec la joie que l’on devine. Nos braves soldats eurent toutes les peines du monde à faire comprendre aux civils que la guerre n’était pas finie et qu’ils devaient rentrer dans leurs abris. Peine perdue ! Fort heureusement, les Allemands étaient bien partis et une heure plus tard, un détachement de chars libérateurs faisait son entrée dans le Val en liesse. C’était enfin la Libération ! ».

Roland Dardaine confie encore quelques anecdotes de cette époque de guerre :

« Lors du bombardement, Madame Bienfait dut la vie … à son amour pour le café. Elle quitta en effet sa vaisselle pour boire une deuxième tasse de ce nectar (obtenu en troquant du lait ou des œufs) quelques minutes avant qu’un obus frappe la façade de sa maison tournée vers Petitmont, juste au-dessus de l’évier ! Elle s’en tirera avec quelques côtes cassées et des égratignures. Mais très choquée, elle se traîna couverte de gravats jusqu’au devant de sa maison. »

Fernand Masson, ajoute … :

« Lors de l’entrée des troupes libératrices dans la Grande Rue, côté Nitra, celles-ci rencontrèrent un habitant : Monsieur Gustave Blaise. Un des soldats lui demanda de porter le message selon lequel tous les habitants devaient impérieusement rester dans leur maison, à l’abri. Ce message, transmis de porte en porte, eut le résultat inverse de celui escompté : tout le monde sortit, au mépris du danger, pour acclamer les libérateurs. Il n’y eut heureusement aucune conséquence dramatique. ».

Au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale, le Val est meurtri et la situation économique du commun est catastrophique essentiellement due à l’activité au ralenti des deux usines.

Olivier BENA

Sources :
Val-et-Châtillon, son passé, ses gens – Roger CORNIBE
Bulletin municipal de Val-et-Châtillon, 1994.


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